LA LIBERTÉ D’ÉTABLISSEMENT EN TANT QUE LIMITE À LA COMPÉTENCE DES ÉTATS MEMBRES POUR ÉTABLIR LES CONDITIONS D’OCTROI D’UNE PENSION DE RETRAITE AUX PERSONNES AYANT EXERCÉ LEUR LIBERTÉ DE CIRCULATION

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(Arrêt du 5 novembre 2014, Somova, C-103/13)

Silvia Petrova

 

La décision de la CJUE dans l’affaire “Somova” se réfère à la situation d’une citoyenne bulgare, en âge pour recevoir une pension de vieillesse en Bulgarie, qui vit et travaille comme travailleur indépendant en Autriche. Dans sa demande de pension de 2007 adressée aux autorités bulgares Mme Somova déclare qu’elle a cessé de travailler en Bulgarie et n’est plus assurée au titre de la loi d’assurance sociale, depuis 4 Juin 1996. Les autorités bulgares refusent de lui octroyer la pension au motif que l’expérience acquise en Bulgarie de 1967 à 1996 n’est pas suffisante. Par une nouvelle demande de 2009 Mme Somova demande à ce qui lui soit appliquée un plan de compensation par un remboursement des contributions manquantes, selon la législation en vigueur à l’époque. Cette fois, les autorités bulgares acceptent de lui octroyer la retraite pour vieillesse.

Le 20 Septembre 2011 le Bureau de la sécurité sociale bulgare reçoit des informations des autorités autrichiennes que Mme Somova a présenté aussi une demande pour recevoir la pension de vieillesse en Autriche. Par ailleurs, il s’est avéré qu’au moment de la demande de pension en Bulgarie, et contrairement à ce qu’elle avait déclaré en Bulgarie, Mme Somova continuait à payer ses cotisations de sécurité sociale en Autriche ; également une partie des périodes pour lesquels elle a demandé la pension en Autriche se chevauchait avec les périodes déclarés devant les autorités bulgares.

Selon le Code des assurances sociales bulgare la pension de vieillesse peut être accordée à une personne ayant acquis l’expérience professionnelle suffisante selon le droit bulgare à condition qu’elle ait arrêté de payer des cotisations sociales, à la date de la demande. Au même temps, le droit bulgare n’interdit pas l’exercice ultérieur d’un travail rémunéré par la personne pensionnée. Dans ces circonstances, la Cour de l’UE interprète la compatibilité de cette règle nationale avec le droit de l’UE en matière de liberté d’établissement, ainsi que au regard du règlement 1408/71 concernant un système de coordination des régimes de sécurité sociale.

Dans son arrêt la Cour de justice reconnaît qu’en l’absence d’harmonisation des régimes de sécurité sociale, le législateur bulgare a le droit de déterminer de façon indépendante les conditions pour l’octroi des droits à pension de vieillesse, pour autant que ces règles respectent le droit de l’UE.

La Cour déclare ensuite que les règles relatives à la liberté d’établissement du traité ont été mises en place pour faciliter les citoyens de l’Union européenne dans l’exercice de l’activité professionnelle sur tout le territoire de l’Union. La condition prévue dans le code des assurances sociales bulgare qui requiert à ce qu’une personne en âge pour recevoir une retraite, arrête au préalable ses cotisations sociales, et qui de la sorte l’oblige de quitter temporairement ou d’arrêter son activité indépendante au titre de l’article 49 TFUE, menace le situation professionnelle de cette personne en la décourageant à continuer d’exercer sa liberté au titre de l’article 49 TFUE. Cette règle nationale constitue par conséquent une entrave à cette liberté.

A cet égard, la Cour de justice souligne qu’une réglementation nationale qui empêche ou décourage les personnes ayant droit à la pension de vieillesse, d’exercer leurs libertés fondamentales, y compris le droit de s’établir dans un autre pays de l’UE, et qui n’est pas justifiée par un intérêt public général, de ce fait, est incompatible avec 49 du TFUE.

Cet arrêt est important parce que la Cour de justice a pour la première fois jugé qu’une mesure nationale posant des conditions pour l’octroi d’une pension, domaine dans lequel les EM gardent une relative autonomie législative, peut néanmoins être considérée comme une entrave à la liberté d’établissement, même lorsque la mesure s’applique sans distinction aux différentes catégories de personnes et affecte de la même manière aussi bien les situations internes que les situations dans lesquelles la personne a exercé sa liberté en vertu de l’article 49 de TFUE.

Pour se conformer à l’arrêt, la condition d’interruption des cotisations sociales pour l’octroi de la pension en droit bulgare devrait être abrogée – à tout le moins pour les personnes qui exercent une activité économique dans un autre EM. Cependant, si le changement législatif ne devait concerner que cette catégorie de travailleurs migrants, à l’exception de toutes les situations internes, ceci aurait comme résultat de discriminer tous ceux qui ont travaillé qu’en Bulgarie et ne peuvent pas invoquer les règles relatives à l’article 49 TFUE. Ainsi, dans la pratique, l’arrêt de la Cour de justice de l’UE exigerait des autorités bulgares à ce que le la législation soit modifiée au profit de tous les citoyens bulgares qui souhaitent demander l’octroi d’une pension de vieillesse, sans devoir interrompre leurs relations de travail au préalable.

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Линк към статията на български език: СВОБОДАТА НА УСТАНОВЯВАНЕ КАТО КОРЕКТИВ НА ПРАВОТО НА ДЪРЖАВИТЕ ЧЛЕНКИ ДА ОПРЕДЕЛЯТ УСЛОВИЯ ЗА ОТПУСКАНЕ НА ПЕНСИЯ НА МИГРИРАЛИТЕ ЛИЦА

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